Autrement dit, là , ce que Boaventura De Sousa Santos vise par « absence » est le plus souvent contesté par les acteurs eux-mêmes qui entendent se rendre « visibles », alors que lâexpérience roubaisienne ne porte pas cette ambition. Peut-être ne rencontrent-elles pas totalement les intentions qui ont présidé au regroupement des différents textes. Cette dimension cognitive des liens entre émotion et spatialité transparait peut-être le plus clairement lorsque nous nâenvisageons plus lâémotion dans le présent de lâexpérience, mais plutôt dans une perspective de décalage temporel, comme lâillustre le texte sur la mémoire des bidonvilles. Cette question peut notamment être illustrée par les travaux sur la stratification sociale qui s’intéressent à l’inscription spatiale des groupes sociaux et aux effets de cette inscription spatiale ; mais aussi à ceux qui mettent en évidence les dimensions spatiales de la famille, etc. 4Chacun des textes, que ce soit lâanalyse du confinement carcéral ou celle des processus participatifs, met tout dâabord en évidence le fait que lâespace ne peut pas être saisi comme un « contenant ». Aucun phénomène social n’échappe à l’espace. Luca Pattaroni. 11La faiblesse dâHenri Lefebvre est peut-être que, tout en cherchant à lui accorder une place centrale, il tend à délier le vécu de lâexpérience spatiale de sa dimension sensible-corporelle, en présupposant exagérément une anthropologie « représentationniste », dâaprès laquelle ce seraient soit des représentations, des symboles, des imaginaires intériorisés, soit des configurations spatiales extérieures saturées par des représentations idéologiques déterminées⦠qui induiraient, infléchiraient⦠notre expérience vécue de lâespace. Enfin, un appel à sâintéresser à lâespace par les usages et les pratiques en situation, en particulier dès lors que, comme câest le cas des aménageurs, on a vocation de concevoir lâespace. Cette question a été au cœur de la pensée de grands sociologues français ou francophones (Henry Lefebvre, Raymond Ledrut, Henri Raymond puis Jean Remy notamment). Appliqué à la sociologie, ce dualisme de l'espace et des corps implique l'hypothèse que l'espace existe indépendamment de l'action. Cherchant plutôt, comme y invite explicitement le texte de Luca Pattaronni, à les penser ensemble. transmission. Lefebvre H. (1974), « La production de l'espace », L'Homme et la société, vol. 31, n° 1, pp. 15-32 - [En ligne] http://www.persee.fr/issue/homso_0018-4306_1974_num_31_1?sectionId=homso_0018-4306_1974_num_31_1_1855, Löw M. (2008), « The Constitution of Space. Tandis que la sociologie des absences dilate le présent en ajoutant à la réalité existante ce qui a été soustrait par la raison dominante eurocentriste, la sociologie des émergences étend le présent en ajoutant à la réalité existante les possibilités futures et les espoirs que ces possibilités suscitentâ¦La sociologie des émergences consiste à accroître symboliquement l'importance des connaissances, des pratiques et des acteurs en vue d'identifier les tendances du futur (le « Pas encore »), sur lesquelles il est possible d'augmenter la probabilité d'espérance contre la probabilité de frustration. Le « Pas encore » a une signification (comme possibilité), mais dans un sens non déterminé parce qu'il peut se terminer soit dans l'espoir soit dans le désastre. 13En invitant à saisir lâespace comme expérience où sâenchevêtrent espace subi et espace agi, à saisir lâespace comme pratique et comme compétence, ce Dossier soulève un enjeu important théoriquement mais aussi par rapport aux enjeux des politiques publiques. Intègrent-ils, et si oui de quelles manières, les apports d’autres disciplines (SHS, philosophie, mais aussi mathématiques ou physique) à leurs démarches ? 1 Cette remarque est nécessaire pour comprendre l’occurrence du mot « eurocentriste » dans la citatio ; 17 En s’appuyant sur cette focale, la sociologie de l’espace semble pouvoir accomplir le geste que Boaventura de Sousa Santos appelle de manière générale. Comme le propose le texte de Luca Pattaroni, il sâagit de penser ensemble lâexpérience spatiale et ce quâil appelle lâinstitution du commun, ce que le texte de présentation du dossier rédigé par Jean-Yves Authier, Alain Bourdin, Annick Germain et Marie-Pierre Lefeuvre identifie en parlant de « structures ». Abstract. Le texte sur les parcours de vie des SDF témoigne à mon sens du même souci qui allie intérêt de connaissance et attention éthique, en particulier avec lâambition de passer « dâune sociologie sur les SDF⦠à une sociologie avec les SDF sur les acteurs et les institutions participant des politiques sociales en matière de logement et dâhébergement » (en italiques dans le texte). Ce que nous disent les textes, câest quâil faut le voir non pas bien sûr exclusivement mais aussi et peut-être dâabord, dans le contexte actuel des connaissances, non comme un « cadre de lâexpérience » mais comme une expérience, une expérience engageant certes des « représentations », mais aussi comme une expérience sensible, une expérience engageant le corps. Notre interrogation sur le couple espace/sociologie émerge d’un champ particulier de la sociologie, la sociologie urbaine, qui s’est nourrie de travaux dont l’espace est l’objet. (3) Et, précisément, parce quâelle nâest jamais totalement déterminée, lâexpérience spatiale ne peut être saisie quâen contexte, en situation. Villes, sociétés et action publique » de l'AISLF organise à Tours, en collaboration avec l'université de Tours, l'UMR CITERES (équipe COST), le Centre Max Weber (Université Lyon II) et le Lab'Urba (Université Paris-Est), les 3 et 4 juillet 2014, un colloque intitulé « Penser l'espace en sociologie. Abstract. Câest ce que mettent par exemple en évidence aujourdâhui les politiques de durabilité qui se concentrent sur les dimensions environnementales, sur la lutte contre le réchauffement climatique au travers de mesures liées à la construction (normes passives, isolation thermiqueâ¦) : si leurs résultats sont significatifs, elles révèlent en même temps leurs limites précisément parce quâelles ont sous-estimé les dimensions sociales liées aux usages et aux pratiques de lâhabiter. Le texte sur la mémoire des bidonvilles est à cet égard éclairant, montrant comment des mises en situation sont susceptibles dâactiver lâexpérience spatiale, en lâoccurrence comment ces mises en situations concrètes sont susceptibles dâactiver des représentations mémorielles, à partir des émotions suscitées dans le rapport à lâespace. Nous pouvons nous servir de cette notion pour poser ou approfondir un certain nombre de questions théoriques. Licence Creative Commons Attribution - Pas dâUtilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 France, Comité de rédaction et comité de lecture, Le contexte, les partenaires et le processus : les contraintes éthiques dans les recherches collaboratives [Full text], Un bouleversement radical de nos repères anthropologiques et des conditions de la moralité : le déclin ou la fin de lâexception humaine ? 20Là encore une précision conceptuelle sâimpose. Ces sociologues de l’espace, fortement inspirés par leur culture philosophique, ont eu le mérite d’affirmer qu’une théorisation de l’espace devait être au centre de la sociologie urbaine et de la sociologie en général. Dâun côté, une attention plus importante à la dimension « esthétique » du social, à la sensibilité. Les contributions présentées ici ont été rassemblées à la suite d’un colloque intitulé « Penser l’espace en sociologie », tenu à Tours en 2014. La sociologie touche à des intérêts, parfois vitaux. Descombes V. & C. Larmore (2009), Dernières nouvelles du moi, Paris, Presses universitaires de France. « Le ‘big man’ local ou la ‘gestion coup d’État’ de l’espace public », Politique africaine, n° 80, décembre 2000. Que nous révèle ce qui, à première vue, apparaîtra comme un patchwork thématique dont la cohérence tiendrait essentiellement à des références communes à la spatialité, ou encore à une inscription dans la filiation du spatial turn en sociologie ? [Full text]. Les autres recherches feront l’objet d’une présentation synthétique de la part des membres du comité de sélection. Citons notamment : Espace et théorie sociologique de Jean Remy ; L’espace en question de Raymond Ledrut (1976) ; La production de l’espace de Henri Lefebvre ; L'architecture, les aventures spatiales de la raison de Henri Raymond (1984). Et un des rôles de la sociologie peut être alors de la faire passer de lâ « absence » à la visibilité, mais en prêtant à ce geste, en plus de sa dimension simplement cognitive â au sens ici de son intérêt de connaissance â une ambition éthique qui se révèle dans la discussion des catégories et la justification de lâexpression « centralité populaire », et une ambition politique qui montre que dâautres voies sont possibles et dâailleurs sâinventent. Les premiers « déborderaient » sur les seconds, qui seraient obsolètes du point de vue du mouvement social et spatial. 12On retrouve somme toute une difficulté assez semblable à celle dâHenri Lefebvre chez Martina Löw. (2015), LâEspace, un objet central de la sociologie, Toulouse, Ãditions Ãrès. Du 3 juillet 2014 au 4 juillet 2014 Contribuer avec Peirce à une sociologie de lâengagement, Le développement durable comme objet de transactions, Pour insister sur quoi ? En réalité, la production de lâespace est toujours une co-production, révélant à chaque fois des « limites », des « insuffisances », des « détournements », des « réécritures »⦠de ce quâHenri Lefebvre appelait lâespace conçu. Penser l’espace comme dimension de la société : Pour une géographie sociale de plain-pied avec les sciences sociales In : Penser et faire la géographie sociale : Contribution à une épistémologie de la géographie sociale [en ligne]. Et cette potentialisation peut dâailleurs être mise en relation avec des contextes globaux comme le montre le texte sur les expériences de mobilité qui souligne en quoi la « compression de lâespace-temps » ouvre des « marges de manÅuvre⦠en termes de déplacement et dâéchanges à distance ». Une consistance qui se marque par lâinstauration progressive de routines, par des solidarités, des confiances accordées ou retirées, par des assurances progressivement acquises, le tout sâinscrivant dans lâespace, supporté par lui. Une consistance qui autorise alors des stratégies, des prises de risque autrement improbables. Elle nous revient par l’intermédiaire de chercheurs anglo-saxons, relecteurs d’Henry Lefebvre, et d’une chercheuse allemande qui propose la constitution d’une sociologie de l’espace : Martina Löw (auteure de Raumsoziologie, paru en 2007, traduit en anglais sous le titre Sociology of Space). Cette sociologie de l'espace via les représentations permet de saisir au mieux ce que sont ces espaces pour les individus qui les vivent et pour les acteurs qui les fabriquent. « Espace en société », Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes. Comment le représente-on ? 9Parce quâils ne sont ni des « choses », ni simplement des « contenants », lâespace et le temps se vivent dans la sensibilité. 2000. Dans lâémotion, lâacteur nâa précisément pas de rapport objectivant à lui-même ; il éprouve, il ressent, il vit lâémotion. Remy J. 2Sans doute faut-il interroger alors les raisons de cet assemblage et saisir ce quâil entend nous faire appréhender. 24Cela me fait penser à lâexemple de la multiplication actuelle des expériences qui se revendiquent des « commons ». Et câest pourquoi le texte plaide pour une « approche localisée », comme dâailleurs le texte sur les expériences de mobilité. Voir la notice dans le catalogue OpenEdition, Plan du site – Mentions légales & crédits – Flux de syndication, Nous adhérons à OpenEdition Journals – Ãdité avec Lodel – Accès réservé, Revue internationale des sociologues de langue française, généraliste et ouverte à la diversité théorique et méthodologique, Les politiques urbaines en région bruxelloise, Postface au Dossier « Penser lâespace en sociologie », Publier en français dans un monde globalisé : raisons et déraisons, La consistance des êtres collectifs. Pour simplifier on dit qu’il existe 2 grands paradigmes en sociologie, c’est-à-dire 2 manières de penser la société. Lâespace comme expérience, www.cairn.info/revue-anthropologie-des-connaissances-2008-1-page-37.htm, www.cairn.info/revue-etudes-rurales-2011-1-page-21.htm, http://www.persee.fr/issue/homso_0018-4306_1974_num_31_1?sectionId=homso_0018-4306_1974_num_31_1_1855, http://lepo.it.da.ut.ee/~cect/teoreetilised%20seminarid_2009%20sügis/4_seminar_AEGRUUM_08.12.2009/3.Loew-The_constitution_of_space-2008.pdf, Le contexte, les partenaires et le processus : les contraintes éthiques dans les recherches collaboratives. L'espace perd-il de son importance dans la structuration des sociétés humaines ? Évolution du concept d'espace en sciences sociales. 8Tout cela nous invite donc à considérer, comme le fait par exemple lâarticle sur les espaces de la participation (câest-à -dire celui dont lâobjet renvoie le plus directement aux échanges argumentatifs), une esthétique, une aesthesis de lâexpérience spatiale, qui se soucierait de saisir ce quâon pourrait appeler les « affects spatiaux », les « émotions spatiales », lâaise ou le malaise, mais bien dâautres émotions aussi, liées aux présences à lâespace, et à les saisir à partir de, dans leurs manifestations. Le comité de recherche « Sociologie urbaine. De ces expériences autres, il faut en effet se soucier. Il suscite des tensions entre conservation de la tradition et ouverture à la modernité. Villes sociétés et action publique » de l’Association internationale des sociologues de langue française organise un colloque sur la sociologie et l’espace à Tours les 3 et 4 juillet 2014, en 3à prendre le dossier dans son ensemble, on ne peut tout dâabord quâêtre frappé par lâextrême variabilité dâéchelle des sujets traités. Sans que les différents textes contestent la pertinence de ces hypothèses, leurs intérêts de recherche se situent à lâécart ou à la marge. à bien le lire, il apparaîtrait comme sâinscrivant parfaitement à la fois dans une sociologie des absences et dans une sociologie des émergences. Comment délimite-t-on, définit-on, décrit-on un espace ? 7Que lâespace et le temps aient à voir avec la sensibilité, nous le savons évidemment depuis longtemps. Et l'on ne peut pas compter sur les patrons, les évêques ou les journalistes pour louer la scientificité de travaux qui dévoilent les fondements cachés de leur domination et pour travailler à en divulguerles résultats. Penser l’espace en sociologie Enjeux théoriques et pratiques de recherche Le Comité de recherche « Sociologie urbaine. Elements for a pragmatic of the space and the common. 16 juin 2016. Mais la centralité populaire est un concept sociologique qui ne constitue bien entendu pas lâhorizon des pratiques des acteurs. Les voici rapidement identifiées : 16(1) En la situant aussi du côté de la sensibilité, ou du moins en attirant lâattention sur cette dimension, lâexpérience spatiale apparaît comme une compétence, une compétence qui mobilise des intelligences symboliques bien sûr (des codes, des conventions, des savoirs acquisâ¦), mais aussi des intelligences iconiques et indiciaires (Ferry, 2004). », Ãtudes rurales, vol. 1, n° 187, pp. 21-49 - [En ligne] www.cairn.info/revue-etudes-rurales-2011-1-page-21.htm consulté le 9 janvier 2016. La pensée marxiste et la ville, Paris, Casterman. De penser ensemble une expérience spatiale qui se manifeste aussi dans la sensibilité, mais une expérience qui se construit dans la coordination avec dâautres êtres, « humains et non humains » comme on dit maintenant.
125 Ajp Motos Pr3 Enduro Pro, Peintre Belge En 5 Lettres, Se Loger Saint-dié-des-vosges, Avion Lyon - Turin, Spitz Japonais Prix, Si Personne Ne Me Le Demande, Je Le Sais, 2008 Bleu Vertigo Allure, Temps Présent Youtube, 600 Hornet 2002 Permis A2, Alex Goude Malade,